La paix par l’équilibre des forces, par le concert des nations, par le multilatéralisme et la sécurité collective, par le droit, par la dissuasion nucléaire etc. : l’histoire n’a cessé de chercher la formule idéale pour maintenir la paix. Et les guerres n’ont cessé de rompre ces équilibres. La réflexion sur la paix se nourrit de ces échecs : sur les conditions nécessaires, les acteurs, les moyens, les objectifs, les garanties, que nous apprend l’Histoire moderne de la paix ?
Nicolas Baverez, Avocat, essayiste
L’histoire de la paix peut être lue comme une série d’échecs relatifs, qui n’apparaissent que plus évidents avec la fin de la guerre froide (Somalie, Irak, Soudan, Afghanistan, Bosnie Herzégovine etc.) La paix fut longtemps en effet réduite à des accords diplomatiques entre des Etats. Ni les peuples, ni les cultures des sociétés, n’étaient pris en compte. Or dans la mondialisation, il ne peut y avoir de paix interétatique sans paix sociale. Comment changer d’approche ?
S’il est une région où la paix semble impossible, c’est bien le Moyen-Orient. En dépit de tous les plans de paix qui se sont succédés depuis 1948, le conflit israélo-palestinien perdure. A chaque bouffée de violences, la perspective d’une paix durable semble reculer. Toutefois, ce conflit n'empêche plus une certaine normalisation des relations régionales (pays du Golfe, Maroc), dans un Moyen-Orient en pleine recomposition. La paix y trouvera-t-elle un chemin ?
Si vis pacem para bellum. Cet adage sert de clé de voute à l’ensemble des politiques de défense, quel que soit le régime et la puissance du pays. Pourtant, dans les conflits contemporains, à de rares exceptions près, la paix ne se construit pas sur le succès des armes. Quelles leçons tirer du conflit en Ukraine ? La paix sur le continent est-elle possible ? A quelles conditions ? Par quels chemins ? Que doit faire l’Europe ?
La dissuasion nucléaire a assuré la paix en Europe pendant toute la guerre froide. La menace d’ascension aux extrêmes d’une destruction planétaire dissuadait tout début de conflit conventionnel entre les deux blocs. Une même logique contraignait les autres puissances nucléaires avérées. Mais la fin de la guerre froide a ouvert un débat difficile : sur l’amoralité de l’arme nucléaire, sur son efficacité relative, sur son avenir technologique etc. Quelles leçons tirer de la guerre en Ukraine pour l’avenir de la dissuasion ?
Qu’il s’agisse du conflit israélo-palestinien ou de l’Ukraine, les résolutions des Nations Unies appellent toujours les parties en conflit à trouver une « paix juste et durable ». Cet objectif est-il réaliste ? Quelles sont les conditions de la justice après des barbaries réciproques ? (Tribunal, réparations comme pour le Traité de Versailles ; réconciliation et pardon comme en Afrique du Sud) ? Quelles sont les garanties d’une paix durable (Désarmement, mesures de confiance, garanties négatives de sécurité, occupation etc.)?
Depuis Montesquieu, le commerce est censé adoucir les mœurs et le libéralisme économique s’est développé sur les vertus de l’interdépendance, pour la croissance mais aussi pour la stabilité planétaire. Cette vertu est-elle confirmée dans la mondialisation ? Les affrontements géopolitiques résistent-ils aux interdépendances économiques ? Faut-il remettre du contrôle politique sur la liberté des marchés ? Quelles leçons tirer de la crise du covid et de la guerre en Ukraine ?
L’Europe a été conçue dans l’optique d’une éradication de la guerre entre Européens. Sa politique extérieure confère à l’élargissement, aux accords de coopération, au traités commerciaux une place prépondérante, aussi importante sinon plus que ses opérations extérieures de maintien de la paix. Depuis 2003, plus d’une trentaine d’opérations ont eu lieu sous le contrôle de l’UE. Avec quel bilan ? Quelles perspectives d’avenir ?
L’ONU plus décriée que jamais, plus indispensable aussi ? La gouvernance particulière du Conseil de sécurité condamne souvent l’ONU à l’impuissance, faute de consensus entre les 5 Etats membres permanents. Mais l’ONU ne peut être réduite à cette dimension. C’est dans l’ensemble de ses compétences et de ses réalisations (santé, réfugiés, faim dans le monde, missions de maintien de la paix etc.) qu’il convient de l’appréhender. Et le bilan est loin d’être négatif